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à l'Ecole Normale d'Instituteurs de Vannes, Morbihan, de 1966 à ....

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éloge funèbre de Monsieur Deville (1)

 

 
André Deville est né en 1913 en Picardie, non loin du "Chemin des Dames", qui allait devenir tristement célèbre quelques années plus tard. Son père, il ne l'a pas connu: le fantassin Gaston Deville est mort -et disparu- à l'âge de 34 ans, lors des premières batailles de la Grande Guerre (le 2 novembre 1914).

Dans les arsenaux, la main d'oeuvre manquait: on embaucha des femmes, dont Madame Deville, jeune mère et déjà veuve de guerre.

Durant sa petite enfance, dans son village situé dans le Soissonnais, André rencontra maints Sénégalais venus au repos après avoir combattu, des Sénégalais qui grelottaient dans la neige et sanglotaient: "beaucoup froid! beaucoup froid!"

1918: La France est victorieuse. Mais même pour le vainqueur, les temps sont durs. En 1924, dans l'école fréquentée par André, on gelait encore dans des baraques.

1925 - 1929: scolarité à l'E.P.S. (École Primaire Supérieure).

1929 - 1932: scolarité à l'École Normale de Laon.
     
                             Cette même année 1932, obtention du BPMS (Brevet de Préparation Militaire Supérieure), brevet que tout bon normalien se devait de passer.

                           Obtention également d'un sursis aux obligations militaires, permettant la poursuite des études. André Deville fut admis ensuite à l'E.N.S. de St-Cloud. Il en sortit en 1936, maîtrisant parfaitement l'Allemand, "mieux que le Français!" dira-t-il...

..................................................... à suivre..........

 

éloge funèbre de Monsieur Deville (2)

 

 
1935-1936: André Deville passa un an à Heidelberg, où il assista à la montée du nazisme. En Mars 1936, Hitler avait décidé de remilitariser -un casus belli-
la Wehmacht naissante qui était encore bien fragile à cette époque.

Le matin du 7 Mars, André Deville se rendant à la Faculté, rencontra une foule inquiète: pas un applaudissement, pas un bras levé... Le soir, quand il écouta la radio française, il entendit une voix chevrotante:

"Jamais nous ne tolérerons Strasbourg sous le feu
des canons allemands!"

Ce fut tout.
Le lendemain, il descendit à la faculté et vit une foule soulagée et
des visages trionphants:

"Le Fürher a bien fait... Ça, c'est quelqu'un..."


Dire qu'en 1936, quelques bataillons français franchissant le Rhin auraient enfoncé la Wehmacht ! L'occasion de briser les reins du nazisme
a été manquée.

1937-1938:
Ce fut le service militaire.
 Le Sous-Lieutenant-Interprète Deville
fut affecté à l' État-Major de Région, à Paris. De son bureau, il sentit que, face à la Wehrmacht, qui n'était plus celle de 1936, la France pourrait bien avoir
une mobilisation de retard.

1938-1939:
Il enseigna à l' E.N. de Dijon. Il avait lu Mein Kampf et constaté qu'aux pages 199 et 737, la France était visée. Il voulut alerter le public par des réunions en ville. Jeune fonctionnaire astreint à une obligation de réserve, il demanda une audience au Recteur. Réponse de ce dernier:

"Non, mon jeune ami... Cela pourrait passer pour de la provocation."

Déçu, André Deville se bornera à informer les élèves-maîtres.

Un soir, à Dijon, il assista, pour voir, à un meeting communiste. Après plusieurs discours, on posa la question de savoir si quelqu'un  avait quelque chose à dire?
à demander? Il se leva et prit la parole:

"Je suis professeur à l' E.N. Je voudrais savoir pourquoi il n'a pas été question des procès de Moscou?"

" Fasciste !  Nazi ! "
lui fut-il répondu...

Le lendemain, il y eut un écho dans la presse locale: la réunion a été un succès malgré les propos  d'un individu se disant professeur.

.......................................... à suivre.............

 

éloge funèbre de Monsieur Deville (3)

 

 
Le 12 Août 1939, André Deville épousa un professeur de lettres. La lune de miel ne dura que douze jours. La guerre, qu'il sentait approcher, éclata plus tôt qu'il ne l'avait prévu. Interprète de la 2ème Division Légère Mécanique, il fut refoulé avec son unité sur la plage de Dunkerque. Recueilli sur le contre-torpilleur La Flore, où s'entassaient pêle-mêle Français, Anglais et soldats Marocains, Il dut débarquer dare-dare sur un quai de Douvres. Sans même avoir amarré, La Flore vira de bord et remit le cap sur Dunkerque.

Toute sa vie, André Deville exigea le respect envers les populations de couleur qui ont fourni des soldats en 1914-18 et en 1939-45, ainsi que des ouvriers pour reconstruire la France après les guerres.

Il revint en France par Cherbourg et fut démobilisé.

Durant la deuxième guerre mondiale, redevenu enseignant, il habita, entouré de sa famille, à Commercy. Les temps étaient durs, tout était rationné: les chaussures, le linge, le savon, l'alimentation... Les rations? 50 grammes de beurre par mois, 90 grammes de viande avec os par semaine.
Et encore, pas toutes les semaines...

................................ à suivre..........

 

éloge funèbre de Monsieur Deville (4)

 

 
Après la guerre, André Deville fut nommé à  l'E.N. de Montigny-Lès-Metz.
Ses cours sont restés célèbres, il avait le don de captiver son auditoire. Durant les stages, venant visiter ses élèves-maîtres, il prenait souvent la classe en mains et faisait montre de ses qualités pédagogiques.

Un virtuose !

Il fut nommé ensuite Inspecteur Départemental de la Circonscription de Boulay

André Deville acheta sa première voiture, une 4CV Renault, et sillonna inlassablement son secteur. Ne le vit-on pas, un soir d'hiver, vers 21 heures, par une tempête de neige, rendre visite à un instituteur dirigeant un cours d'adultes dans un petit village retiré?

Ce fut ensuite à nouveau l'enseignement à l'E.N. de Montigny, avec une petite circonscription créée à son intention, celle de Vigy

Une promotion, et son dernier poste, l'attendent à Vannes: la direction de l'École Normale, qu'il assuma pendant quatorze ans.

Parlant et écrivant couramment le Russe, il fit 2 séjours en URSS: en 1965 et en 1966. Donneur de sang en France, André Deville se rendit au Centre de Transfusion de Moscou. Lors de l'opération, il ne manqua pas d'interroger le personnel sanitaire:

- " Vous ne craignez rien?
- Pourquoi?
- Attention! C'est du sang de bourgeois, du sang de capitaliste..."

Un haussement d'épaule accompagna un

 "qu'est-ce que ça peut bien faire?!".......

Décidément, la foi marxiste-léniniste n'était plus ce qu'elle fut.

..................................... à suivre...............

 

éloge funèbre de Monsieur Deville (5)

 

Monsieur et Madame Deville
Monsieur et Madame Deville 
Sa retraite, André Deville la passa dans sa villa de Pen-Prad, à Sauzon,
en Belle-Île.

En 1977, il adhéra à Amnesty International. Chaque mois, il écrivit à trois chefs de gouvernements de pays totalitaires, pour leur demander la libération de prisonniers politiques disparus ou arbitrairement détenus. C'est ainsi qu'il avait écrit en 1990 à Saddam Hussein pour s'enquérir du sort de trois jeunes kurdes disparus. La lettre a été retournée à l'envoyeur.

Monsieur Deville commença à étudier le Chinois et fit, par ailleurs, deux séjours à Pékin: au printemps 1982, et en mai 1989, juste avant le massacre de Tien-An-Men du 4 juin 1989.

Vers l'âge de 90 ans, sa vue perdit beaucoup de son acuité; mais il continuait à écouter chaque jour Radio-Moscou pour entretenir la langue de Tolstoï.

Monsieur André Deville décéda à Belle-Île en 2004, à l'âge de 92 ans.

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Techniquement, il n'a pas été possible de rendre la photo
plus nette, ce qui est désolant.